Brèves
Journée d'hier mouvementée. J'ai fait un malaise dans le bus en sortant des cours. La chaleur, le tournis, Sara par terre. Le conducteur en panique appelle les pompiers.
"Mademoiselle, mademoiselle, quel jour sommes-nous ?
- Je suis passée en explication de texte en anglais ce matin, on est jeudi.
- Mademoiselle, où sommes-nous ?
- Pas loin du lycée.
- Non mademoiselle, c'est un camion de pompier, nous sommes dans un camion et nous allons à l'hôpital."
Arrivés
à l'hôpital, ils m'envoient au service gynécologie. Bah oui, une jeune
fille qui fait un malaise est forcément enceinte. J'ai beau leur dire
que j'ai mes règles et qu'il y a peu de chances que j'ai une brioche au
four, ils s'acharnent.
"Vous allez voir un médecin qui va vous faire un bilan de santé.
- Prise de sang ?
- Peut-être.
- J'y vais pas !
- Mais vous n'avez pas le choix, vous avez fait un malaise, on est intervenu, vous devez absolument voir un médecin."
Je
n'ai pas mes papiers sur moi, l'infirmière me demande quatre fois si je
suis française. Et je me retrouve dans la salle d'attente du service
gynécologie. Une jeune asiatique en mode autiste, un jeune couple de
blacks qui se disputent haut et fort, une femme enceinte jusqu'aux yeux
qui plonge frénétiquement la main dans un paquet de chips et humidifie
régulièrement un gant de toilette qu'elle garde sur le front. Elle a
l'air de souffrir atrocement, il ne fait pas bon d'être enceinte par ce
temps. Et il y aussi une grosse dame noire, l'air fatiguée, en robe
traditionnelle crasseuse et en baskets/tongs. Elle trimballe ses trois
énormes sacs plastiques avec elle et répète machinalement "si
on ne me fait pas l'échographie je dois m'en aller, il y a l'office à
15h à l'église évangélique de la Bastille, je dois y être, je vais
partir." Elle parle toute seule, a l'air sérieusement atteinte. Elle s'adresse au jeune couple qui n'en finit pas de s'exclamer : "Les jeunes, les jeunes. Je ne comprends pas. Dieu, donne moi la force de comprendre, donne leur la force de garder l'enfant." Puis elle se tourne vers moi et me répète "Faut pas tuer les bébés, c'est un cadeau du ciel. Moi, je le garde, il faut pas tuer les bébés..." Je n'ai ni le droit de manger ni le droit le boire avant de voir
un médecin. Il est 14h, j'ai faim et quand j'ai faim, je deviens irritable.
Au bout d'une demi-heure de prêchi-prêcha, je lui dis gentiment qu'un
embryon, ce n'est pas un bébé et qu'il y a des gens très sérieux qui
ont étudié le développement de la cellule qui lui diront tout ça mieux
que moi. Erreur fatale. Elle est maintenant persuadée que je viens pour
une démarche d'avortement et ne me lâche plus la grappe. Je craque. Je
retourne voir l'infirmière pour lui dire que je vais bien, que je ne
vois pas ce que je fiche au service des gros bidons et que je vais
rentrer chez moi.
"Rentrez si vous voulez, mais si vous refaites un malaise, on n'est pas responsable."
Super,
elle n'aura pas ma mort sur la conscience. Je sors au pas de course de
cet asile de fous et file chez moi. Pas que ça à faire. Une fois rentrée, je fonce à Franprix acheter des kinder
bueno, du toblerone et une bouteille de taillefine aromatisée. A la
caisse, la caissière me dévisage d'un air désespéré "encore une victime de la pub..."
J'ai envie de lui dire que ce n'est pas du tout ce qu'elle croit, que
c'est ma technique d'automédication testée et approuvée, et que mum me
soutient. Mais je ne le fais pas.
Après-midi & soirée tout en douceur avec A. : prélude à la sieste et pâtisserie viennoise. Elle sait dire "je suis speed" en espagnol. On est bien. La vie est belle.
C. m'a fait un collage merveilleux... "Ecrivez ! Que l'érotisme printanier chasse l'hiver des âmes chômées..." Pour une fille en vacance, elle ne chôme pas vraiment des dix doigts.