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In Bocca Al Lupo
20 janvier 2008

Ainsi parlait Kamasoutra

Sur google, je tape "Andromaque", histoire de trouver une jolie petite image pour accompagner une critique que je voulais assassine de la mise en scène de Declan Donnellan vue hier soir à Louviers. Quelle ne fut pas ma surprise de trouver en tête des résultats trouvés ce conseil : "Essayez aussi : position andromaque". Et au milieu d'illustrations issues de kamasutra divers et variés, la couverture de l'Andromaque de Racine à la bibliothèque Gallimard fait bien pauvre figure. Je me racle intérieurement la gorge pour retrouver un semblant de constance (et surtout pour éviter de tomber dans une réaction qui donnerait en substance "Tout fout l'camp ma brave dame"). Alors comme ça, on ne lit plus Racine, mais on le fait ? On fait Andromaque comme on fait catleya ?...

A quoi reconnait-on un chef d'oeuvre ? Certainement pas au fait qu'il nous parle encore des siècles après son écriture ; on reconnait un chef d'oeuvre à sa capacité à faire un bon titre bien évocateur pour une position du kamasutra. Par exemple, "chérie, tourne toi steuplé j'voudrais qu'on fasse Les lettres de mon moulin..." c'est moyennement sexe. Par contre, vous admettrez que "attends, encore un peu, on n'a pas fait Andromaque..." a un potentiel érotique à vous faire bander une plante verte. Peut-être est-ce la sonorité ? Le [drrr] qui combine la nécessité de placer la langue contre les dents (pour produire une dentale) et le rugissement-grognement-ronronnement du félin tantôt dominateur, tantôt soumis, toujours sexy ? Le [k] qui allie brièveté et brutalité ?

Je ne sais pas ce qui m'a le plus frustrée. Petita de tomber sur une position dont j'ignorais le nom jusque là. Petibé de me dire que je suis une grosse réac, faisant partie de ceux pour qui Andromaque évoque "Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes" et pas "vas-y... passe tes jambes au-dessus de ma tête".

Approfondissons un peu plus. Comme la frustration a un pouvoir moteur extraordinaire, je me retrouve à taper "position andromaque" sur google. Et je navigue de site en site, très heureuse d'apprendre que la position en question n'est pas un sac de noeud tarabiscoté mais un missionnaire inversé. "Pour les anciens, il était connu qu'Andromaque, la femme du grand héros d'Homère, Hector, "chevauchait son époux", et ils racontaient que "derrière les portes, les esclaves phrygiens se masturbaient chaque fois qu'Andromaque montait le cheval d'Hector". Le couple légendaire donne ainsi sa caution à une position pourtant controversée : l'homme y est en situation inférieure, la femme le domine et a la maîtrise du jeu." 

Je reste un instant songeuse. Ainsi cette position qui oui-oui-oui est très bien a un nom. Ca ouvre des perspectives incroyables de nommer ! (NDLR : bien sûr, ce n'est pas une découverte, je ne suis pas née de la dernière pluie ayant arrosé le pays de Candy, mais ça ne fait pas de mal de le redécouvrir de temps en temps) Ainsi donc, toutes mes supputations musicales tombent à l'eau ; il y a vraiment un lien avec Andromaque. Andromaque-la-femme.

Liens utiles en la matière
Faire l'amour et dire faire l'amour (écholalie)
Faire catleya, faire blanquette (langue sauce piquante)
Faire catleya au XVIIIe siècle (doc PDF)

Avec tout ça, j'en ai perdu l'envie de faire ma critique. Bon, n'allez pas voir cette mise en scène. Just focus on the text comme dirait l'autre. Et voyez ce que le poids de la mémoire a de douloureusement actuel. Sérieusement, pourquoi le metteur en scène les a tous fagotés en costumes seconde guerre mondiale ?! Avec toutes les passerelles possibles entre la scène théâtrale et la scène internationale (la reconnaissance des crimes perpétrés en Algérie -pour ne citer qu'un seul exemple, mais la réponse à la question de la responsabilité d'une génération à une autre, à savoir "devons-nous payer pour les actes de nos pères ?" a trouvé de multiples échos depuis 1667, et pas seulement entre 39 et 45...), il nous cantonne à une époque bien précise. Je sais que c'est sa vision du texte. Mais c'est dommage.


"Il faut se croire aimé, pour se croire infidèle" (IV,1)


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Commentaires
S
Tout à fait d'accord pour l'Esprit des lois. Une position un peu brute de décoffrage, qui se voudrait mimétique du style-code-civil de Montesquieu.<br /> <br /> Pour la Chartreuse... Mmmh... On pourrait en dégager une multitude de positions plus intéressantes les unes que les autres. Je me lance ?<br /> <br /> "Faire Farnese" (notez l'alliteration en F rappelant l'eFFort à Fournir par la Femme) signifierait "tailler une pipe" (le glissement entre cette merveille architecturale et le sexe masculin est simplissime : la tour Farnese, massive et aérienne à la fois ; le sexe masculin, imposant mais aussi léger puisqu'une simple idée suffit à le soulever...).<br /> <br /> Voir aussi "faire Waterloo" qui consiste à gourmander son voisin de lit ; "faire tric-trac" dont la dimension de jeu suggererait que la partenaire est en train de simuler ; etc, etc...
M
Je suis soufflée par cet article, ainsi que par la déviation sexo-littéraire qui en découle ^^ <br /> <br /> <br /> à quand la position "Chartreuse de Parme", "Belle Hortense", "Esprit des Lois" ? (cette dernière nécessitant l'usage d'une table analytique pour répertorier le nombre d'orteils qui doivent être pliés à angle de 49 degrés)
N
mdr<br /> ultimate mdr !
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